

pas les seuls
L'héléien en exil à vichy était jauressien et avait ses habitudes au "Merle moqueur". Le lieu était tenu par un vieil homo-fêtard aux portes de la retraite, le roi Jacques. Il venait d'opérer une étrange mutation : il accueillait les chiens, il acceptait que des enfants lui rendent visite et sa barbiche grise se faisait toute douce quand les petites filles le bisaient. Sinon, il disait que sa vie de garçon était finie.
L'héléien y retrouvait un pierrot, qui ayant trouvé sa colombine, la vit emportée par la maladie aux lendemains de leurs épousailles.
Il avait une petite qui de bébé, s'était faite petite fille. C'était une amie de sa colombine qui la lui avait donnée, elle aimait son pierrot. La petite, c'était leur union. Mais tout autre lien était distendu et douloureux.
Le pierrot et l'héléien s'entendaient bien au comptoir. Ils parlaient de tout et de rien. Et pourtant se disaient beaucoup parfois.
La mère de sa fille comme le roi Jacques lisaient beaucoup : l'héléien parlait livres et mots croisés, il leur parla des Particules Élémentaires.
Le pierrot avait deux amis. Un irlandais bridgeur (il y était brian), très sérieux et aussi très joueur. Du coup, il avait été séduit par une parigote à lunettes, généreuse à flo et rigolote. Elle avait déjà deux petits à lunettes et était venue ici pour qu'ils voient plus souvent leur père qu'elle avait abandonné.
Le second était un homme grand, fort et brun : c'était un loup apprivoisé mais taciturne, pas du tout un filou, non un philoup. Il venait rarement, trop sauvage, trop méfiant. Il vivait apparemment seul chez sa mère dans un grand domaine à la campagne.
Toujours accompagnée d'un collier à barbe, une blonde vénitienne apparut avec un profil de madone. Pas une madone douloureuse, non, mais sereine.
Sur elle, elle était très propre et on l'imaginait sécher au confessionnal, désespérant de trouver le moindre péché. Elle semblait jeune.
L'histoire n'était pas du tout ça.
Elle avait deux enfants, l'aîné avait 14 ans, et les gens demandaient à l'héléien qui pouvait bien les garder quand elle était là : il ne pouvait leur répondre, il ne s'était jamais posé ce genre de question.
Elle quittait son mariage et le collier de barbe était son poisson pilote, son chien fidèle tout pataud, si ébloui qu'il en baissait les yeux.
Ambulancier, il connaissait les mots de la vie. Mais il n'avait pas les mots, sauf ceux de la Légion où il s'était essayé très jeune. Il y avait vu du pays mais ses souvenirs de paysages étaient ceux où il avait perdu des camarades.
Sorti du co-con, il s'était retrouvé tout seul et s'était raccroché à la moindre bienveillance. ça avait d'abord été le pierrot qui avait fini par reprendre sa distance.
Peut-être y-en-avait-il eu d'autres avant de se choisir poisson-pilote de la vénitienne bourbonnaise qui était pharmacienne.
Tous les deux n'avaient pas beaucoup appris à parler, alors il s'était acheté leurs paroles au rayon prêt-à-penser en télé-achat.
Lui, il n'y tenait pas plus que ça à parler de toute façon.
Elle aurait bien voulu, elle avait envie.
Quand l'héléien se fit très provocant, l'ambulancier de la Légion se tut mais étonnamment ne le prit pas mal. C'était bien la preuve que l'héléien était tout nimbé des flamboiements de la comète Hélé.
La madone claire fut frappée, très intéressée : l'héléien était bien nimbé.
Et il se dit que lui et sa comète n'étaient pas les seuls à se débattre avec la vie.
Pas les seuls.
Juste peut-être avec un peu d'esprit.
Reste le soleil… qui s'est levé.
Fin de « pas les seuls »
à la suite,
le jour se lève
pour
ceux qui aiment les peines
des femmes et des hommes
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